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BIODIVERSITÉ ET TERRITOIRES PARTAGÉS









OURS DES PYRÉNÉES et à part pour les photos, ça sert à quoi de les avoir réintroduits ?

Il y a des peurs de partager des territoires avec différents espèces d’animaux propres même du lieux...
Même sentiments que pour l’immigration humaine?
On veut seul les ours de peluche?
On laisse l’opinion d’un expert dans ce sujet spécifique, le professeur Romain Julliard*

Des ours ont été réintroduits dans les Pyrénées françaises : ils seraient 31 à ce jour. Quelles sont les conséquences ?

En 2013, 25 ours avaient été détectés. Aujourd'hui, ils sont 31. 
Est-ce que cela peut laisser espérer quelque chose de bon pour cette espèce menacée ?
C’est évidemment une bonne nouvelle pour l’ours et ce qu’il représente. Mais cela reste une population extrêmement fragile.

Dans quel but les ours ont-ils été réintroduits dans les Pyrénées ?
L’ours est notre plus gros mammifère terrestre. Comment accepter de le voir disparaitre à jamais ? Renforcer le petit noyau d’individus au bord de l’extinction par le relâcher de quelques uns est une solution qui permet avant tout un sursis.

Les ours ont-ils un impact sur leur environnement ?
Qu'apportent-ils à l'écosystème ? Est-ce que les élevages qui sont à proximité peuvent être touchés ?
L’ours est assez omnivore et aux densités auxquelles on le rencontre, on ne peut pas parler ni d’impact ni de rôle dans les écosystèmes. Si on décide de le conserver, c’est pour d’autres raisons : les Pyrénées, la France, ne seraient plus tout à fait les mêmes si ces habitants – nous tous – ne parvenaient pas à garder l’ours dans leur patrimoine. Concernant l’élevage, il peut arriver que l'ours attrape une brebis mais l’impact sur les troupeaux est dérisoire si on le compare à la mortalité liée aux maladies, aux accidents, aux attaques de chiens, le problème n’est pas là.

Qu'est-ce qui explique que les ours aient quasiment (complètement ?) disparu du territoire français ?
Les humains considèrent l’ours comme un compétiteur depuis toujours et ont déployé des moyens considérables pour s’en débarrasser comme pour le loup et le lynx, les aigles, etc. Il n’a subsisté que dans les endroits les plus inaccessibles, ou comme cela se produit souvent en Europe, aux frontières où sans doute les humains avaient d’autres chats à fouetter.

Cet environnement est-il adapté pour eux ? Peut-on espérer que leur réintroduction aboutira à quelque chose de pérenne ? 
Le problème principal de l’ours est l’acceptation par tous. Il est beaucoup plus facile à chasser que le loup et quelques « accidents » peuvent réduire à néant tout espoir. Aujourd’hui, certains trouvent qu’on en fait plus pour l’ours que pour eux. Tant que ce sentiment persistera, l’ours n’aura aucune chance. Il faut que l’ours fasse parti d’un projet de territoire partagé. Regardons la Lozère où une population de 400 vautours issue de réintroductions fait partie aujourd’hui de l’image de marque de ce département, et égaie dans tous les dépliants touristiques. L’acceptation par les agriculteurs et les acteurs économiques laisse penser que les choses peuvent changer et la biodiversité devenir un patrimoine partagé.  



* Romain Julliard, Professeur du Muséum national d'Histoire naturelle, biologiste, spécialisé en Biologie de la Conservation; les thèmes de recherche principaux de Romain Julliard portent sur l'homogénéisation fonctionnelle de la biodiversité, ses mécanismes (réorganisation des communautés sous l'effet des changements globaux) et ses applications (construction d'indicateur de biodiversité).

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